Ainsi, il aura fallu attendre l'arrivée de la talentueuse Wallen à la fin du siècle dernier pour enfin décoincer et bousculer tous ces rythmes groovy et frenchy empotés et ces paroles fadasses (eh oui, « Love me do » sonnera toujours mieux que « Aime-moi », quelque soit le genre musical, c'est comme ça...) frôlant le ridicule. Parce que chez Wallen, R&B ne rime ni avec fric, ni avec soupe, mais plutôt avec génie et sincérité. Avec son complice Sulee B Wax, Wallen nous a démontré en trois excellents albums et quelques titres éparpillés sur des compiles, qu'elle n'a rien à envier au popotin de Jennifer Lopez ni à aucune minette en mini-short et à l'avenir éphémère.
Wallen est un anagramme plutôt réussi de Nawell, le nom que la chanteuse a reçu à sa naissance en 1978. La chanteuse passe son enfance à Bobigny, en Seine-Saint-Denis. Dans sa famille, on est plutôt branché musique, des frangins mordus de funky à une s½ur experte en chant lyrique. Wallen de son côté se met au violon et prend des cours au conservatoire. Les parents de Wallen sont loin de baigner dans le luxe, font tout ce qu'ils peuvent pour permettre à leurs enfants de concrétiser leur rêve et de réussir dans la vie. Il n'y a pas que les cordes de son violon que la jeune-fille aime taquiner, elle joue aussi des cordes vocales et finit même à l'adolescence par prendre la décision de faire une carrière de chanteuse.
Elle commence alors par se produire sur l'émission « Wake Up » de la radio TSF en chantant des jingles. Puis Wallen rencontre Sulee B Wax, un ancien rappeur qui s'est mis à la production et ce dernier prend en main l'avenir musical de la demoiselle. Il lui fait écouter la crème du R&B US, notamment Aaliyah, qui devient alors l'un des modèles de Wallen, et l'aide à perfectionner son chant, à trouver sa voie (comme sa voix !) dans les rythmes groove et R&B. Wallen participe ensuite à plusieurs compiles mais ne fait pas dans le featuring à outrance, hormis pour ses potes artistes, notamment les poulains de Sulee B Wax.
Jusqu'à maintenant, le parcours de Wallen reste coincé dans le milieu underground, le R&B made in France n'ayant pas encore vraiment explosé. On a en effet l'impression que seuls les chanteurs américains maîtrisent à la perfection ce genre musical et les premiers balbutiements quelques peu ratés du R&B français semblent confirmer ce sentiment général. Mais Wallen a du talent, un ami producteur très doué, et a donc toutes les cartes en main pour percer. La chance finit donc par lui sourire lorsque les DJ's Kost et Goldfinger lui proposent de collaborer à Double Face 3. Wallen chante alors pour cette compile, "La Quête du Soufre" qui se fait particulièrement remarquer.
Puis la chanteuse enregistre le morceau « Celle qui a dit non » où en duo avec Shurik'n d' I.A.M, elle continue, comme dans « La Quête du Soufre », à affirmer dans ses paroles son refus de se corrompre pour réussir. Avec cette chanson sans concession, Wallen en disant non, se fait un nom, et elle peut enfin enregistrer un premier album, A Force de Vivre, qui paraît en 2001. Le disque fait un carton et devient très rapidement disque d'or.
Il est vrai qu'entre les compositions et les arrangements de Sulee B Wax qui égalent le meilleur de la production R&B américaine (The Neptunes, Timbaland...), le chant de Wallen qui flirte en finesse avec le flow hip hop et les textes à la fois tendres, intimes et incisifs de la chanteuse, qui parle aussi bien de ses amours que d'un quotidien sombre aux prises de la discrimination, de l'intolérance et du mal-être, ce premier opus ne peut être que novateur, créatif, et dépasse de loin tout ce qui peut se faire en France côté hip hop et R&B.
Après une nomination aux Victoires de la Musique en 2002, Wallen continue à faire parler d'elle en enregistrant le remix d'un titre de Usher, « U got it bad ». Mais la jeune-femme n'est pas seulement une faiseuse de tubes, elle est aussi, ses textes le prouvent, une personne engagée, concernée par ce qui l'entoure, dénonçant le malaise social, le racisme, l'injustice, la vie pas toujours rose dans les cités. C'est la raison pour laquelle celle qui a déjà dit non récidive avec un « non » bien senti, contre le FN cette fois, en participant au titre « Sachons dire non- La lutte est en marche » composé pendant l'entre deux tours des présidentielles de 2002.
A tout juste 26 ans, Wallen sort en 2004 un second opus, Avoir la vie devant soi où la jeune femme, mariée au chanteur Abd Al Malik et maman depuis 2001 d'un petit garçon, a troqué son habit de princesse du R&B pour prendre celui de la grande s½ur au discours toujours engagé mais au ton plus posé, plus mûr, plus réfléchi. Pour la composition, la réalisation et la production de ce nouvel album, la chanteuse s'est de nouveau associé à Sulee B Wax.
En octobre 2008, Wallen nous surprend encore avec un nouvel album qu'elle intitule Miséricorde. "La musique doit être grande, mystérieuse, comme une prière à dieu, alors Miséricorde, c'est ainsi que commencent toutes mes prières". Elle porte comme à son habitude un message de paix, de tolérance et d'altruisme, notamment à travers le premier single, "Business", où elle dénonce les comportements individualistes dans notre société.
Miséricorde présente des featurings avec Micky Green, Matteo Falkone et son mari Abd El malik.
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